Vie et Carrière de mon père

Né le 7 Novembre 1907 à Primelin (29770 Finistère) à la ferme de ses grands  parents maternels située au village de Kerscoulet (les RIOU sont à Kerscoulet depuis au moins 1600).
La légende dit qu’Eugène serait né dans le lavoir de la grand- mère ( voir photo), situé dans la vallée du Steir, le long du chemin descendant au moulin de Kerscoulet. Son père était quartier- maître chauffeur dans la Marine Nationale et sa mère sans profession.
Il a été à l’école primaire de Primelin de 1914à 1921 et ensuite il est allé fin 1921 à l’Ecole Primaire Supérieure de Douarnenez ou il était pensionnaire. Il a fréquenté l’option Menuiserie.
Il avait pris également la spécialité enseignement nautique qui préparait aux écoles de la Marine de Paimpol et Nantes.
En Mai 1925 il a passé le concours national de surnuméraire des PTT (6à7000 candidats)
Classé 110ème pour 100 pris il est nommé à Madagascar !!Il renonce et repasse le concours en Mai 1926.En septembre il est reçu et nommé en décembre à Paris .N’ayant pas fait le cours d’instruction, il a de grosses difficultés .Il travaille au bureau de Paris 30 ou il n’y a que des guichets. Le receveur l’a très mal reçu et a téléphoné à la Direction pour lui dire que cet employé, n’ayant pas suivi le cours d’instruction, était inutilisable !!et qu’ il voulait le rendre à la Direction.
Heureusement le personnel du bureau était très sympathique et 2 jeunes qui avaient suivi le cours se sont occupé de lui. Le personnel était essentiellement du Midi et du Sud-Ouest.
Un contrôleur l’a mis en doublure au guichet avec l’indicateur universel des PTT ;tous les soirs, Eugène le potassait. Après quelques semaines il pouvait tenir un guichet d’enregistrement des Lettres Recommandées et des paquets. Petit à petit il a donc appris le métier sur le tas.

En Mai 1928 il fait son service militaire à Brest au cours de télégraphiste et radio –télégraphiste du sémaphore du Parc au Duc. Il mangeait et dormait à la caserne Guépin qui était le siège de la Musique des équipages de la Flotte. Cela lui a permis de découvrir la Musique Classique.

En Septembre 1929 retour à Paris. En Octobre 1929 cours d’instruction de 3 mois à Chalons sur Marne. Cela lui a permis de montrer son expérience de dénicheur de nids de pie ;en effet après quelques coupes de champagne le jeu consistait à grimper le plus rapidement en haut des peupliers !!!Il a également ,en décembre aidé par son copain D’Hervé, sauvé de la noyade une jeune fille de 16 ans qui s’était jeté dans le canal ,à la suite d’un chagrin d’amour ;il n’a évidemment reçu aucun remerciement de sa part !!

En Janvier 1930 il est nommé au central télégraphique de Paris (3000 personnes) ou il reçoit l’instruction pour les appareils Baudot et Hughes.

En Avril 1930 il est nommé commis au central télégraphique d’Angers (49) .Il est polyvalent et travaille de nuit au téléphone.

En Novembre 1933 il se marie avec une jeune postière originaire de Saint-Christophe la Couperie(49) rencontrée au théâtre ;un premier enfant :Jean Yves naît le 16/04/1936.

En 1939 il passe le concours du Rédactorat sans préparation ;il n’est pas reçu mais est très bien classé. Fin 1939 il se met à apprendre en cours interne le droit public , le droit commercial et le droit international ;cela fut très difficile.

Le 10 Mai 1940,jour de l’invasion allemande naît le deuxième enfant :Alain ( c’est moi). ;cela lui évitera d’être mobilisé pour la guerre.

Il passe le concours du rédactorat fin 1940 :il est reçu début 1941 et est nommé à Blois
qui se trouve près de la ligne de démarcation. Le bureau est très important car il reçoit une dizaine de sacs par jour pour les passeurs. Fin 1941 le directeur demande à Eugène de se rendre d’urgence au bureau de Celles sur Cher avec la voiture de direction. En effet il a reçu une information comme quoi le facteur receveur risquait d’être arrêté par les Allemands car il était d’origine juive !!Après une entrevue avec sa femme et lui, Eugène lui conseille de passer en zone libre.Le lendemain à 6 heures du matin la Gestapo était chez le receveur qui avait fui.
Quinze jours après nouvelle alerte et Eugène recommence l’opération et le postier est sauvé ;mais quelques jours après,la Gestapo ne trouvant personne enferme sa femme et ses enfants .Le directeur informé ,se rend à la Gestapo ,en demandant de repartir avec la femme et les enfants. Il n’a pas de succès et est mis à la porte. Il refuse de repartir sans les personnes. Tard dans la soirée ils sont libérés. Mon père mériterait donc de faire partie des JUSTES.

Eugène passera un an et demi à Blois ;il revient de temps en temps à Angers. A la belle saison il vient à vélo passer le week-end à Angers.

Fin 1941 il est nommé rédacteur à la Direction Départementale d’Angers.

Compte tenu de l’Occupation il est très difficile de venir à Primelin car c’est une zone interdite. Eugène s’arrange avec Marianne la Secrétaire de Mairie de Primelin pour avoir des laissez-passer.

La Direction des Télécom d’Angers a des relations directes avec l’Armée Allemande ;mi-1943, celle-ci demande de grosses quantités de fils de cuivre. Malheureusement il n’y a pas de réserve et il faut donc démonter les fils télégraphiques ;heureusement les services allemands
sont mal organisés et pour 1000kg récupérés,300kg sont cachés le long des voies ferrées sous des tas de cailloux. Tout cela est risqué :dans le département de la Manche le Directeur a été fusillé !!!

En Avril 1944 naît le 3ème et dernier enfant du couple :Maryvonne

En 1945 Eugène passe inspecteur principal à l’ancienneté

En 1955 il appartient à la section des dirigeants de bureau de postes et est nommé receveur à Cherbourg. Le bureau de Cherbourg a un très important service de transbordement de milliers de sacs postaux venant de toute l’Europe du Nord et de l’Est par trains spéciaux, lesquels partent en Amérique sur les paquebots de la Cunard Line :le Queen Mary et le Queen Elisabeth. ,cela une fois par semaine,.la même opération se fait au retour d’Amérique.

En septembre 1958 suite aux gros problèmes de santé de son épouse, Eugène recherche rapidement un bureau avec un climat plus clément, c’est-à-dire celui du Sud-Est. Il atterrit au bureau de Marseille Saint-Giniez  dans le 8ème arrondissement de la ville ;c’est un bureau très mal tenu par le précédent receveur, dépassé par le déferlement des rapatriés d’Algérie. Il y a 160 facteurs dont 80% de Corses et 100 agents de bureau. Dès sa prise de service Eugène est soutenu par la Direction et obtient 10à 12 postes supplémentaires. Tous les ans il y a un accroissement important du trafic.
En 1968 le bureau comporte 250 facteurs et 200 agents.

Il a pris sa retraite en Juin 1968 comme receveur de classe exceptionnelle et depuis il coule des jours heureux dans sa propriété de Kerlavénan à Primelin. Ses passions sont la pêche, la lecture ,le jardinage et la défense de l’Environnement.

Pour le jardinage, il a planté 2 hectares d’arbres dans les propriétés de ses fils et il cultive et entretient toujours son jardin de 3000m2 ;il n’y a que quelques années qu’il a renoncé à la bêche.

Pour la défense de l’environnement, il a été un des fondateurs de la lutte contre la centrale nucléaire de Plogoff ; il était responsable du Groupement Foncier Agricole. Ce fut quand même un exploit de faire reculer l’Etat ;Merci Fanch Mitt !!!
Il a quand même été traîné en justice 3 fois pour cette affaire !!

Son épouse est décédée en Janvier 2005 à l’âge de 95 ans ;malgré son chagrin Eugène continue à vivre chez lui faisant ses courses,sa cuisine et est resté très autonome !!

Pour ses 100 ans (voir photo) il a réuni autour de lui ses 3 enfants ,6 petits-enfants et 3 arrière –petits-
enfants , ainsi que sa sœur âgée de 94 ans toujours en vie ;à cette occasion il nous a chanté des chansons de l’époque de sa jeunesse et raconté quelques anecdotes parfois croustillantes.

Il a conduit sa voiture ,une petite Samba grise, surnommée par les personnes du secteur, la Flèche Grise ,car il avait le pied lourd.,jusqu’à l’age de 101 ans.Grâce à la rupture de l’embrayage nous avons pu l’empêcher de conduire.En effet il avait tendance à conduire au milieu de la route et bon nombre d’habitants du Cap Sizun le croisant, n’ont dû leur salut qu’en roulant sur l’accotement !!!

Il continuait à planter des haricots à l’âge de 104 ans.

Sa mémoire immédiate étant largement défaillante il ne pouvait plus habiter seul chez lui et a fini ses jours à l’EPHAD de Cléden cap sizun et y est décédé le 20/12/2013 à l’age de 106 ans,
étant vraisemblablement un des doyens de Bretagne.

 

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